MICE : Dis-moi comment tu payes, je te dirai combien

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Le mode de règlement des prestations MICE est archaïque. La modernisation des process de paiement du client peut être un levier convaincant pour séduire des fournisseurs qui profitent actuellement d'un contexte favorable. Retour sur une table-ronde de la Masterclass GBTA 23.

Les JO 2024 : une grosse demande MICE. En face, des lieux événementiels pas multipliables à l'infini et des lieux existants dont on ne peut pas repousser les murs. Résultat : le rapport de force est désormais du côté des fournisseurs. Dès lors, dans les négociations, pour les acheteurs, il s’agit de montrer patte blanche.

Dans ce contexte, les assurances que peut offrir un client en termes de paiement peuvent constituer un levier stimulant pour le fournisseur - Vincent Coudon, key account manager chez Chateauform’, le confirme. Sauf que le paiement, dans le domaine du MICE, en est encore à l’âge de pierre.

Mathilde Le Gall, directrice commerciale d’AirPlus explicite: “Aujourd’hui, dans le MICE, le règlement se fait à 99% par du virement. On est à un tournant (suite aux nouvelles pratiques post-Covid et à cette inversion du rapport de force fournisseurs/clients, ndr), et c'est une bonne occasion pour remettre à plat une stratégie mais aussi des process.”.

Une pratique à l’ancienne, qui pose un certain nombre de problèmes. Nicolas Gutierrez, Global category manager chez Imerys, décrit les deux principaux : d’abord “la gestion des différentes factures en interne. (Pour un même événement) on gère une ou deux factures d’acompte, une facture de solde, tout ça en complément d’un devis (et pour chacun des fournisseurs, ndr). La réconciliation est compliquée (...) sur ces factures, les termes sont différents…” Ensuite, le reporting : “Je mets au défi tout acheteur d’avoir un reporting consolidé de l’ensemble ses dépenses MICE”.

Cette façon de faire old school constitue aussi un irritant pour les fournisseurs. Vincent Coudon : “Entre un événement tel que prévu 6 mois auparavant et l'événement le jour J il peut y avoir de gros écarts (en termes de prix, ndr), car on a rajouté, de l’animation, des taxis… On peut alors avoir un moyen de paiement avec un plafond, avec une durée de vie limitée, non adapté à ce genre de situations.” 

Le business travel comme modèle

Certes, le MICE n’est, en la matière, pas le seul mauvais élève : comme le rappelle Mathilde Le Gall, “presque tous les règlements entre entreprises se font par virement”. Mais si l’obsolescence apparaît avec un tel éclat, c’est que ce domaine souffre de la comparaison avec l’autre pan du déplacement professionnel : le business travel (individuel) qui, lui, est arrivé à maturité. “Les process de paiement sont fluides et optimisés - c’est d’ailleurs complètement intégré par le voyageur lui-même : se pose-t-il la question d'avoir du cash pour payer son Uber ?”.

C’est donc de ce dont il faut s'inspirer pour le MCE : que cette simplification de l’expérience utilisateur du business travel trouve son équivalent, dans le MICE, pour les achats, comme pour la finance - trésorerie et comptabilité. 

La bonne nouvelle; c’est que l’industrie des moyens de paiement est en effervescence : “De nombreuses cartes virtuelles, à usage unique ou multiple, font leur apparition sur le marché, explique Mathilde Le Gall. Elles permettent de gérer factures et acomptes sur un même PO (purchase order : bon de commande, ndr), de façon harmonisée, autorisant l’émission de données analytiques enrichies à des fins de réconciliation automatique.” Une forte imperméabilité à la fraude en prime.

Reste que passer du virement à la carte revient à rien moins que de la délégation d’autorité… Comment, dès lors, convaincre le CFO, de perdre la main ?

Nicolas Gutierrez : “C’est l’amélioration de son BFR (Besoin en fonds de roulement), le désencombrement de son cash flow, la simplicité, le coût de gestion de la facture… S’il y a 1 centime d’écart entre le PO et la facture reçue, ça bloque le process de règlement : l’acheteur se retrouve au milieu entre les comptables des deux entreprises”.

Toutes ces solutions de paiement adaptées au MICE sont encore en phase de maturation. Elles nécessitent, d’après Mathilde Le Gall, des retours d’expérience de congress managers, acheteurs et autres parties prenantes, pour s’améliorer encore. Pour l’heure, et de façon plus concrète, Vincent Coudon confirme que dans ce contexte faste pour les fournisseurs, la règle, c’est “pas d’acompte, pas d'événement”.