Tribune – TMC : coachs ou dépendantes des programmes de RSE ?

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Tribune - TMC : coachs ou dépendantes des programmes de RSE ?

Alexandre Veau est un acteur international reconnu pour sa gestion de projets transverses dans le domaine du voyage d’affaires. Créateur de VITA Consulting, société de conseils spécialisée dans la création d’environnement de voyage d’affaires performant, il apporte ici une vue sur le rôle des TMC dans l’accompagnement de programme RSE.

Sujet de plus en plus présent au sein des entreprises, la responsabilité sociétale des entreprises a été boostée par une prise de conscience brutale lors du de la dernière Cop 26 fin 2021, sur la partie éco-responsabilité. Différents rapports mettent en avant une volonté plus forte des entreprises de progresser sur les sujets RSE : 70% d’entre elles ont une volonté de mise en place de programme RSE et environ une sur deux connaît son empreinte carbone.

Quel est le rôle des TMC dans l’accompagnement des programmes de RSE chez leurs clients ? Le voyage d’affaires étant souvent cité comme le premier émetteur de CO2, doivent-elles se positionner comme coach sur ce sujet ?

Les TMC moteurs de la transformation

Du fait d’un manque de cohérence concernant les données d’émissions des différents acteurs, il est difficile de mesurer la portion exacte du déplacement professionnel par rapport à l’empreinte carbone totale de chaque entreprise. Il est cependant indéniable que la mobilité peut représenter une partie significative pour l’entreprise, donnant une légitimité aux TMC d’accompagner leurs clients sur cet axe.

Comment ? En mettant des outils à disposition pour limiter, mesurer ou compenser la consommation de CO2.

L’affichage au travers des OBT du CO2 au moment d’une réservation d’avion ou de train devient maintenant un standard, même si une normalisation de la mesure reste à confirmer. Cette dernière étant encore plus complexe pour l’hébergement.

Ces données d’empreinte carbone, ainsi collectées, permettent aux TMC de recommander des actions correctives à travers la politique voyage, de proposer des alternatives, comme l’utilisation du train pour les déplacements courts ou de compenser la consommation à travers des partenaire spécialisés.

Afin de rendre le voyageur acteur dans la démarche RSE, l’affichage du coût de compensation ou des programmes de gamification peuvent également être proposés, rendant le voyageur plus responsable.

Quelle légitimité ?

Il n’est cependant pas raisonnable de demander aux TMC de gérer le programme RSE pour leurs clients Corporate.

Avant tout parce que la RSE ne se limite pas à la partie durabilité. D’autres axes majeurs, sociétaux, sont à prendre en compte comme la diversité, l’inclusion, l’insertion ou tout autre élément permettant d’avoir un impact positif. La norme ISO26000 rappelle ces grands axes. Sur la parte environnementale, une revue des processus et des habitudes de l’entreprise permet ainsi de mettre en avant les sources de plus grande émission.

Pour être au cœur de l’entreprise, le programme RSE ne peut également pas être sous-traité. Il doit faire partie de la culture d’entreprise afin que chaque employé soit acteur et contribue à l’objectif d’entreprise.

Les TMC ont également une limite dans leur légitimité : ce n’est pas leur expertise première, elles n’interviennent que sur la mobilité de leurs clients et peuvent être juge et partie quand il s'agit la mise en place de programmes diminuant la consommation de CO2 au détriment de leurs propres revenus.

Quelle sincérité ?

En effet, voyager plus responsable signifie des voyages moins réguliers, des modes de transport moins profitables, sans oublier la dimension sociale qui s'accommode mal de voyages trop fréquents pour un même collaborateur. 

Il n'empêche, l'argument "nous TMC pouvons vous accompagner dans votre transformation RSE" est vendeur. Dès lors, ces mêmes TMC sont incitées à s'appliquer à elles-mêmes les bonnes pratiques qu'elles préconisent auprès de leurs clients. Sinon, quelle crédibilité ?

Lorsqu'elles le font, on ne peut pas parler de greenwashing si ces mesures ont effectivement un impact. Mais d'effet marketing, certainement, du moins pour un certain nombre d'entre elles. Doit-on pour autant les démoniser ou fustiger leur éventuel manque de sincérité (qui restera toujours problématique à prouver) ? Je ne crois pas. Car à ce chapitre particulier de la RSE qu'est la baisse des émissions de CO2, seul le résultat compte.