Coronavirus: les compagnies aériennes françaises interpellent l’État

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Le pavillon aérien français est gravement menacé par la crise du coronavirus. Le groupe Dubreuil (Air caraïbes, French bee) regrette les aides spécifiques que l’Etat prévoit d’apporter à Air France. 

Les gouvernements français et néerlandais ont confirmé l’un et l’autre, ces jours-ci, étudier toutes les conditions possibles d’un soutien à Air France-KLM. On pourrait ainsi voir l’État français, son actionnaire à hauteur de 14,3%, recapitaliser l’entreprise en montant au capital du groupe franco-néerlandais. Ces annonces font réagir les autres compagnies aériennes françaises.

Le Groupe Dubreuil (Air Caraïbes, French bee) a ainsi déploré les mesures prévues par l’État pour soutenir Air France-KLM. Jean-Paul Dubreuil, son président, s’est interrogé dans La Tribune sur le fait qu’«une compagnie plutôt qu’une autre bénéficie de la manne de l’État qui permet d’avoir une position beaucoup plus laxiste que la nôtre car elle entretient l’idée que l’Etat viendra toujours à son secours», tout en ajoutant qu’«il n’attendait pas la manne étatique du sauveur». Le patron du groupe vendéen demande seulement que l’État facilite les reports de charges et de taxes en plus du recours au chômage partiel.

Son de cloche différent chez Corsair. Outre le report des charges, Pascal de Izaguire, son président, souhaite que l’État aille plus loin et réclame des aides publiques sous forme de recapitalisation ou de prêt, ainsi qu’une exonération des taxes spécifiques au transport aérien durant au moins six mois.

Les compagnies appréhendent bien sûr très différemment l’avenir, selon leur situation financière et la nature de leur actionnariat. Le groupe Dubreuil est connu pour être bien géré et en bonne santé, avec une trésorerie de 250 millions d’euros. Avec la mise en place du chômage partiel et le report de charges et taxes, il prévoit de passer ce cap difficile. Air Austral est pour sa part adossé à l’île de la Réunion, son capital étant détenu à 86,97% par une société d’économie mixte holding, la Sematra, elle-même contrôlée à 85% par la Région Réunion et le département de La Réunion. La situation est assez proche pour Air Tahiti Nui, dont la Polynésie française est le premier actionnaire avec 84,8% du capital. Et l’actionnaire majoritaire d’Air Corsica est la Collectivité de Corse.

La situation financière est plus difficile à juger pour les autres compagnies françaises, adossées à des groupes étrangers. Corsair avait tenu, en septembre dernier, à rassurer sur sa situation financière «très solide» et sur sa stabilité actionnariale marquée par l’arrivée en mars 2019 d’Intro Aviation, une société expérimentée dans le secteur de l’aérien. A ses côtés, 27% du capital sont détenus par TUI, premier groupe mondial de tourisme et de voyage, et 20 % par les collaborateurs de Corsair. ASL Airlines France est pour sa part la filiale du groupe irlandais ASL Aviation Holdings DAC .

Chez EasyJet, deuxième compagnie aérienne en France, l’ensemble des syndicats se sont félicités récemment des mesures d’activité partielle dans l’Hexagone, qui concernent 1 700 salariés. Et outre-Manche, le directeur général de la low-cost britannique, Johan Lundgren, en a déjà appelé au soutien de l’État, même si la compagnie ne manque pas de liquidités, pas davantage que Ryanair d’ailleurs. Les gouvernements britannique et espagnol réfléchiraient à un plan commun pour sauver le groupe IAG (British Airways, Iberia, Vueling, Level, Aer Lingus). Le Sunday Times évoquait même comme options, récemment, des prises de participation de l’État dans British Airways, voire le démantèlement du groupe IAG. Volotea, enfin, compagnie low-cost espagnole reliant les grandes capitales européennes, très présente en France, compte trois groupes d’actionnaires, les fondateurs Carlos Muñoz et Lazaro Ros, ainsi que des fonds d’investissements espagnols et américains. Difficile là encore de s’avancer sur sa solidité…

On notera enfin que l’Union Nationale des Compagnies Aériennes Françaises (UNCAF) interpelle elle aussi le gouvernement et réclame des aides et non des prêts. L’UNCAF compte, parmi ses membres, des compagnies telles TwinJet, VallJet, Alpine Airlines, Airelles, ainsi que plusieurs compagnies d’hélicoptères.