Communication « sortie de crise » : Tu m’énerves avec ta bonne humeur !

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communication sortie de crise

Ça y est, ça s'arrange côté "coronavirus" dans quelques régions de notre planète. Il n'en fallait pas plus pour que des acteurs du tourisme se remettent à communiquer comme des diables qui sortent de leur boite. Et comme si de rien n'était...

Un fragile frémissement d'optimisme... Les habitants de Wuhan sont enfin "libérés" et à peine ce symbole fort du berceau de l'épidémie qui s'affranchit de son carcan s'étale-t-il en une des médias, que, déjà, la résilience des acteurs du tourisme s'exprime... 

Asiatiques ou moyen-orientaux, ces acteurs du tourisme. Pour l'instant... On peut imaginer que ces démonstrations de volontarisme et d'enthousiasme post-crise vont se décliner  dans le temps en fonction de la résorption de l'épidémie, d'une zone géographique à l'autre. Un peu comme ces sempiternels feux d'artifice qu'on voit célébrer la nouvelle année, dans les JT du 31 décembre et du 1er janvier, dans un ordre d'apparition suivant le sens horaire, des îles d'Océanie à la Californie...

Emails

A ce titre, la boite email d'un journaliste est riche d'enseignements. Ce mercredi 8 avril, alors que l'Europe guette avec fébrilité le fameux "pic de l'épidémie", frémit à la moindre variation de déclivité de ses courbes; que les Etats-Unis sont passés, dans le décompte de leurs victimes, d'un mode arithmétique à une suite exponentielle; que le monde entier anticipe avec effroi la multiplication des étincelles dans la poudrière africaine, les Offices de Tourisme de Taïwan et d'Oman, eux, se remettent à communiquer comme s'il ne s'était rien passé.

Côté taïwanais, on se félicite que "plus de 11.8 millions de visiteurs internationaux ont découvert (le pays) en 2019". Depuis 5 années, ce chiffre dépasse les 10 millions, nous apprend-on. Hum... On a un mauvais pressentiment, là, Monsieur Taïwan, il est possible, pas sûr, hein, mais possible, que cette statistique connaisse une légère inflexion contre-cyclique en 2020...

Ce qui serait d'ailleurs fort dommage car, à Taïwan, nous dit-on, "l’année 2020 est l’année du tourisme de montagne. L’île est couverte aux deux tiers de sublimes montagnes et collines (dont) la Yushan, autrement appelée Montagne de Jade (...). Il existe des chemins de randonnées pour tous les niveaux, accessibles des plus grandes villes de l’île." Non mais franchement, à quoi on pense ? On se prend la tête pour accéder enfin au plateau de notre épidémie alors que la Montagne de Jade nous tend les bras ! So stupid !

Mauvaise humeur

Quant à Oman, c'est carrément la teuf, flonflons, cotillons et valse-musette ! Pas la peine de vous déconfiner au Bois de Vincennes, cette année, la Foire du Trône, c'est là-bas ! Attention, vous êtes prêt ? "(Le) Sultanat d’Oman (...) lance aujourd’hui un sympathique (sic) défi aux agents de voyages pour leur permettre de gagner un voyage personnel à Oman ou une place pour un éductour". Youpi ! Attendez, petit checking, oui, c'est ça : l'étymologie de "sympathique", c'est "souffrir avec". Ça nous touche beaucoup !

Bon, c'est quoi ce mauvais esprit ? Les acteurs du tourisme doivent passer sans coup férir d'une communication de crise à leur métier habituel qui consiste à vendre du rêve. Pas facile, faut reconnaître. On leur conseillerait cependant de cibler les messages qu'ils délivrent... Mais on ne peut pas se plaindre que les parties prenantes du business travel refusent de répondre à nos appels pour parler de l'après-crise, et, dans le même temps, charrier ceux qui s'emploient à tourner la page, fût-ce maladroitement. C'est pourquoi ce qui est écrit ici n'est sans doute rien d'autre que la mauvaise humeur d'un confiné aigri...