Stratégie : Faut-il privilégier le best buy ou collectionner les accords corporate ?

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En achat, faut-il appliquer une politique d’opportunisme ou de partenariat ? Tout dépend de vos objectifs, de la maturité de votre organisation et de celle de vos voyageurs

On prête aux nouvelles générations la capacité à utiliser avec aisance le digital. Dans le même sens, on n’hésite pas à montrer du doigt le conservatisme des anciennes générations. Mais qui a raison ? Or, tous ceux qui considèrent que les économies sont dans cette approche se trompent !

Le savoir

Il existe des milliers d’applications qui prétendent faciliter l’expérience client dans la réservation d’un voyage. C’est d’ailleurs une des raisons qui explique l’explosion début 2010 de « l’Open booking » (réservations faites directement sur les sites des prestataires ou auprès d’agences en ligne). Certes, réserver est maintenant facile mais bien réserver est une toute autre histoire. Sans connaissances des arcanes et des pièges du marché, il est risqué de prétendre agir comme un agent de voyage expérimenté. Les exemples sont nombreux et montrent que beaucoup d’acteurs de la chaîne d’achat des déplacements professionnels (voyageurs, décideurs) réfléchissent en prix (la valeur faciale des services achetés) et non en coût (le prix + la valeur souvent immatérielle des dits services). Ainsi les frais annexes sont rarement pris en considération (placement dans l’avion, continuité et suivi des bagages, circuit de prise en charge en cas de « coup dur », éloignement d’un hôtel, prix et problématique du « dernier kilomètre » …). Ce n’est pas une faute des exécutants mais souvent une faiblesse des dirigeants qui pensent que, parce que c’est une application internet, le voyageur va savoir ce qu’il faut faire (l’application est forcément bien faite…). Or les pièges sont nombreux. Les travel managers et les acheteurs voyage le savent bien.

Le paramétrage des outils

Le contrat corporate rattaché à une application peut être un garde-fou mais tout dépend de ce qui a été négocié avec le prestataire de service et surtout de la façon dont l’application intégrera l’accord et toutes ses annexes. Nous avons donc une problématique de coût additionnée d’une problématique technique que le couple prestataire / travel managers et/ou acheteurs voyage doivent piloter au jour le jour. De fait, le contrat corporate ne concerne généralement que les 20% du panel fournisseur qui réalise en général 80% du trafic de la société cliente.
 
Les offres et les outils évoluent quotidiennement il faut donc effecteur une veille technico-commerciale permanente pour être certain de l’adéquation avec les besoins qui eux-mêmes peuvent changer de jours en jours. Il faut également s’assurer de l’immédiateté avec laquelle l’organisation et l’application ou l’outil prendra en compte le changement.

Le volume d’achat de l’entreprise cliente

Ce n’est pas parce que l’on vous propose un contrat qu’il est forcément intéressant. Pire, une agence peut même avoir intérêt à ne pas le pousser car elle n’a généralement aucun commissionnement sur les tarifs négociés. De fait, si vous n’avez pas un trafic intéressant pour une compagnie (faites le ratio de leur revenus dans votre pays par rapport au chiffre d’affaires potentiel que vous représentez…) ne perdez pas votre temps à négocier un accord uniquement tarifaire. Sachez que tout ce que vous négocierez prend en compte le seul chiffre d’affaires hors taxes, généralement hors options et souvent sans la YQ (surcharge carburant). Les classes ouvertes à la réservation doivent être celles dont vous avez besoin (en termes de prix, de flexibilité et de restrictions). Vous devez donc parfaitement connaitre votre typologie de voyageur et surtout connaitre leurs habitudes de consommation.

Open booking Vs Best buy

En 2016, fatigués des dérives de coûts générés par les réservations non contrôlées faites en Open Booking, les acheteurs appuyés par les travel managers se sont mis en ordre de marche en imposant une régulation au marché. Les appels d’offres se sont fait plus précis. Sur les contrats agence (et même parfois sur les contrats des prestataires) ils quittèrent progressivement l’obligation de moyens pour l’obligation de résultats. Mieux, le best buy fut progressivement abandonné au profit de configurations technico-commerciales qui encadraient les déplacements des voyageurs. Ils réfléchissent de plus en plus en coût complet délaissant ainsi les actions non rémunératrices mais chronophages (et donc structurellement trop onéreuses pour le peu de bénéfices retirés). De fait, les contrats corporate sont de plus en plus délaissés par les entreprises clientes. Les voyageurs, quant à eux, ne supportent plus de passer 20 minutes pour réserver un Paris-Milan sur un outil archaïque ou mal configuré. Ils deviennent de plus en plus exigeants et informés.

La solution du présent

Dire solution du futur aurait été une ignorance de la réalité car des plateformes existent. Elles sont opérées par des prestataires, souvent confondus avec des agrégateurs voir des TMC, qui proposent des places de marché (les fameuses « marketplace ») qui vont mixer un contenu provenant du best buy (achats instantanés en fonction du prix) et des contrats corporate qui leur sont propres. Cette configuration sécurisée sur le plan technique et commercial va permettre au voyageur de réserver dans un cadre précis avec une flexibilité contrôlée. La connectivité immédiate, le confort et l’aisance d’utilisation sont la clé de voûte de la réussite d’une telle plateforme. Le best buy à la papa consistant à aller au prix le plus bas est mort (preuve en est la chute de nombreux opérateurs low-cost affectés, entre autres, par le rejet de pratiques commerciales jugées douteuses parles voyageurs). Idem pour le contrat corporate qui ne servait qu’à flatter les égaux des signataires. La valeur ajoutée est le seul véritable levier de performance sous réserve qu’elle soit efficace, fiable, réactive et économiquement intelligente. 96.4% des entreprises françaises sont composées de moins de 3 salariés (données INSEE 2018). Elles ne peuvent donc pas perdre de temps dans la recherche d’un prix ou la négociation d’un contrat. La marketplace est donc leur planche de salut mais c’est également le meilleur moyen pour un prestataire de se positionner intelligemment sur un marché volatile et éclaté ayant plus que jamais besoin d'assistance dans un monde en perpétuelle évolution