Nabih el Aroussi, Traveldoo: « Nous avons vision forte et étendue du mot partenariat. C’est essentiel pour réellement créer de la valeur ».

Nabih El Aroussi : A l'image de ce que j'ai déjà lu ici même, nous avons tous pris conscience dans le monde du voyage d'affaires que la crise sera durable. Il faut donc l'appréhender dans le temps et se dire qu'elle nous impose des changements structurels. On ne va pas forcément s'en tirer avec des recettes uniquement basées sur l'économie à outrance. D'autant qu'aujourd'hui, on ne visualise pas tous les changements qu'entraîne cette situation. Il y a donc de nouvelles habitudes à prendre et sans doute des mutations à engager. Nous devons naturellement nous interroger sur les modes de croissance qui nous attendent et comprendre ce qui nous permettra d'évoluer dans un monde économique plus tendu.
Je ne crois pas que la seule façon de créer de la valeur puisse se faire uniquement autour de la notion de baisse des coûts. C'est bien, mais c'est insuffisant. Nous devons chercher à gérer l'austérité tout en optimisant notre façon de dépenser mais aussi de repenser notre relation client. Elle est essentielle à ce que j'appelle un partenariat de création de valeur qui, seul, nous permettra d'avancer. Il m'apparaît difficile aujourd'hui de me dire que les liens fournisseurs/acheteurs sont exclusivement faits d'opposition. On ne peut pas en permanence se dire "Si j'achète le moins cher, j'ai fait une bonne affaire pour mon entreprise". J'ai des dizaines d'exemples qui démontrent le contraire. 2012 a sans doute conduit les entreprises à réfléchir autour de leurs relations économiques et de leurs investissements, y compris dans les déplacements professionnels. Cela ne veut pas dire qu'il n'y a pas de batailles commerciales, d'enjeux économiques à atteindre voire même d'économies à réaliser. Cela veut simplement dire qu'il faut désormais penser que la crise ne pourra pas forcément tout justifier et que nous aurons tout naturellement à nous remettre en cause.

Nabih El Aroussi : Si vous faites allusion au possible transfert d'informations entre nos clients et Egencia, je vous renvoie ce que je vous disais en avril dernier : nous mettons un point d'honneur à cette culture du secret et à la confidentialité la plus totale des informations qui transitent par Traveldoo. Je suis personnellement le garant de la neutralité totale de l'entreprise. C'est une éthique personnelle que partage aussi l'ensemble de nos collaborateurs. Elle est le ciment de notre relation client. Je crois aujourd'hui que les faits sont là pour démontrer que nous respectons scrupuleusement cette politique. Au-delà, notre arrivée chez Egencia est avant tout un outil de développement extraordinaire. Tout d'abord à l'international, où nous avons ouvert un bureau en Angleterre. Nous irons, au second semestre 2013, installer un bureau en Allemagne. C'est incontestablement l'élément fort de notre intégration dans le groupe car cette ouverture sur le monde enrichi notre réflexion sur la qualité globale de nos outils et leur utilisation au-delà des simples frontières françaises.

Nabih El Aroussi : Je ne crois pas que le ROI soit une science exacte au point que chacun des déplacements puisse être mesuré tant en matière de coûts qu'en matière de rentabilité. Cela veut dire que si les outils technologiques aujourd'hui simplifient cette recherche de rentabilité, ils ne donnent pas d'éléments suffisamment exacts pour en tirer des conclusions solides. Il est vrai, et les faits le montrent, que ce retour sur investissement est devenu l'un des thermomètres attendus par les acheteurs. On a pu constater également qu'il ne pouvait se faire qu'avec du temps, une sélection de datas réellement représentatifs du besoin mesuré et une qualité d'analyse suffisamment précise pour donner de la valeur à l'ensemble des données restituées. Nous participons avec nos outils à ce calcul du ROI. Mais attention à ne pas trop se focaliser sur cette vision économique du déplacement professionnel qui fait oublier que le voyage d'affaires est un investissement, intégré à des projets généralement de plus grande envergure, et dont la finalité n'est pas mesurable immédiatement.

Nabih El Aroussi : J'insiste beaucoup sur la notion de partenariat dans la création de valeur. Je crois aujourd'hui que l'association de fournisseurs, qu'ils soient technologiques, transporteurs aériens, GDS ou agences de voyages garantit que l'offre du marché est pérenne et adaptée aux évolutions que l'on pressent. On le constate tous les jours sur le chapitre du mobility management mais aussi sur celui, peut-être plus basique, de la mobilité offerte aux voyageurs d'affaires. Tout le monde est d'accord pour dire que les outils permettent aux voyageurs une gestion nomade de ses besoins. Pour exister, elle doit s'enrichir d'informations en provenance de sources multiples. Il ne saurait y avoir de mobilité sans des partenariats technologiques forts ou chacun des fournisseurs apporte son savoir-faire sans forcément considérer qu'il est systématiquement en concurrence avec un autre.
Nos clients, et ils le font régulièrement, choisissent des agences ou des structures capables de leur apporter, au-delà du simple service de la réservation, une réflexion soutenue sur les politiques engagées pour les déplacements professionnels. C'est aussi ce qu'ils nous demandent. Nous n'en sommes pas encore aujourd'hui à la totale portabilité des datas utilisées dans les entreprises. La fameuse transparence technologique évoquée depuis des années. Ce que nous savons faire, c'est dialoguer avec un ERP utilisé à la fois pour les profils voyageurs et la gestion des ressources humaines mais également avec le SBT ou le module expense. Tout cela doit se faire, quelque soit le choix technologique de l'entreprise. D'où, et j'insiste à nouveau, cette notion de partenariat évolué où chacun des partenaires va créer sa propre valeur.

Nabih El Aroussi : Je ne pense pas qu'il y ait de barrière marquée entre une année qui se termine et une autre qui commence. Dans notre activité, nous avons une continuité construite autour de la capacité qu'apporte Traveldoo à faire évoluer ses produits, en développer de nouveaux, à assister ses clients quotidiennement mais aussi à regarder à moyens ou à long terme quels seront les outils qui seront nécessaires à la gestion des déplacements professionnels. Comme je le disais, créer de la valeur dans un monde économiquement bousculé demande des efforts. Il faut donc proposer des projets innovants tout en se méfiant de l'innovation pour l'innovation car souvent elle est un peu trop en avance par rapport à l'attente réelle de nos clients.
C'est tout un équilibre qu'il nous faut trouver avec un rôle de consolidateur sur les offres globales mais également une vision novatrice des outils à intégrer. Il faut toujours faire très attention à ce que l'on souhaite mettre en œuvre. Nous ne souhaitons pas être un énième outil technologique. On constate d'ailleurs que plus nous avançons, et plus nous simplifions notre offre. Depuis 12 ans que la société existe, nous avons très largement développé et amélioré l'ergonomie, la gestion de la datas, l'exportation ou l'intégration des données qui nous sont demandées sans oublier notre capacité à dialoguer aujourd'hui avec l'ensemble des plates-formes du marché. Notre rôle est donc tout naturellement d'écouter la technologie mais également de l'interpréter pour la rendre accessible à tous.

Nabih El Aroussi : Gérer une entreprise demande de l'optimisme et de la vision. J'ai le sentiment aujourd'hui d'avoir les deux même si, comme je vous le disais, je pense que nous allons affronter des périodes plus difficiles que d'autres et sans doute plus bousculées. Traveldoo à un cap, une vision, un savoir-faire, une technologie éprouvée et des envies de développement. Si le Père Noël nous entend, il sait déjà ce qu'il peut nous apporter.

Entretien réalisé par Marcel Lévy.