Trop, c’est trop !

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Aujourd’hui, je ne vais pas vous parler du transport aérien, mais de micro-économie, autrement dit de l’économie vue par des entrepreneurs de petites entreprises. Une fois n’est pas coutume. Je me suis livré à un petit calcul. Combien un entrepreneur doit-il dégager de chiffre d’affaires pour pouvoir se distribuer un montant net de 1 000 € ?

Trop, c’est trop !
Suivez mon raisonnement. Il faut pour cela prendre quelques hypothèses, bien entendu, mais chacun pourra à loisir adapter le montant final à ses conditions particulières. Alors supposons simplement que l’entreprise dégage une marge nette de 20% de son chiffre d’affaires, ce qui est déjà très remarquable. Supposons également que ses charges brutes de personnel représentent 30% du chiffre d’affaires auxquelles il convient d’ajouter les cotisations sociales (part patronale) qui se montent en moyenne à 49% du salaire brut.

A partir de ces données certes un peu spéculatives, les calculs deviennent possibles. Bien entendu avant de distribuer du bénéfice, il faut d’abord payer justement l’impôt sur les bénéfices, soit 33% pour le moment, c’est d’ailleurs un taux assez répandu en Europe. Ensuite et compte tenu des dernières dispositions fiscales, le montant effectivement distribué est soumis d’abord à la CSG, c’est-à-dire 15% et au précompte d’imposition fixé à 21%. Ce montant prélevé à la source viendra en déduction de l’impôt sur le revenu effectivement payé. Le résultat sera la neutralité si la dernière tranche d’impôts sur le revenu est de l’ordre de 20%, mais si elle est supérieure, il faudra bien entendu rajouter le complément.

Alors, faisons les comptes à l’envers. Le montant net disponible une fois les impôts payés : 33% d’impôt sociétés, 15% de CSG et 21% de précompte, correspond à 57,12% du bénéfice avant impôts. Mais ce n’est pas tout, pour réaliser le bénéfice avant impôts il faut bien évidemment avoir acquitté les charges sociales et autres impôts locaux non comptés dans mon calcul. Dans l’hypothèse que j’ai prise de 20% de marge nette, il faut 5 000 € de chiffre d’affaires pour réaliser 1 000 € de bénéfice avant impôts. Or pour générer ces 5 000 € de bénéfice, toujours dans l’hypothèse où les frais de personnel avant cotisations sociales correspondent à 30% du chiffre d’affaires (cas fréquent dans les sociétés de services), cela entraine un montant de cotisations sociales à payer de 735 €.

Au total, le montant des taxes salariales ou fiscales à payer avant de recevoir 1 000 € net pour un actionnaire est de 1 306 €.

Alors, en supposant toujours que notre entrepreneur prenne un minimum de salaires et tente de gagner sa vie uniquement avec les dividendes distribués, il aura payé 130 600 € pour pouvoir gagner 100 000 €.

Et moi, je dis que c’est tout simplement trop et que cette masse de prélèvements devient confiscatoire. Certes, toute personne vivant dans une société doit la faire vivre et pour cela, on n’a encore rien trouvé de mieux que l’imposition. Sauf qu’il arrive un moment où les montants découragent les meilleurs. Du coup, nombre de chefs d’entreprise ne se distribuent même plus de dividendes car le montant des impôts à payer leur paraît simplement anormal. Ils laissent l’argent dans l’entreprise où il dort. Car qui, dans ces conditions, prendra le risque d’utiliser ce matelas pour investir alors que les lois de finances changent tous les ans et dans des proportions considérables dans notre pays ?

Et cet argent ainsi gelé ne sera même pas remis dans le circuit de consommation et ne servira en aucun cas à aider la croissance.

Il est temps, grand temps que nos gouvernants prennent conscience de ces phénomènes tout simples. Seulement très peu de ceux auxquels on a confié l’Etat, ne savent ce qu’est un bilan, un compte d’exploitation ni même une échéance de fin de mois.

Le Gouvernement veut faire repartir l’emploi ? Ce n’est certainement pas en taxant les revenus potentiels qu’il y arrivera. Trop d’impôt tue l’impôt, adage connu, pas on pourrait ajouter, est générateur de chômage.

Jean-Louis BAROUX