Tribune JL Baroux – Aérien : le futur commence demain

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Jean-Louis Baroux est un acteur reconnu du monde des compagnies aériennes, créateur du World Air Transport Forum et de l’APG World Connect. Dans cette tribune, il est trace les perspectives de ce que sera le transport aérien en 2030.

Une constante : l’écologie

Quoiqu’en disent ses détracteurs, le secteur aéronautique est totalement impliqué dans la recherche de la neutralité carbone. Cela ne date pas d’aujourd’hui. Dès le début des années 2000, Giovanni Bisignani, alors directeur général de IATA, avait fixé comme objectif au transport aérien la neutralité carbone en 2050. Les recherches n’ont pas cessé et elles se sont même accentuées. C’est d’ailleurs ce qui explique qu’avec une croissance moyenne de 5% par an depuis 2000, soit une multiplication du trafic par 2,5 en 20 ans, la part des émissions ait constamment diminué pour de positionner aux alentours de 2,5%. Il n’y a d’ailleurs rien de mystérieux à cette évolution. L’écologie est très rentable pour le transport aérien. Moins il consomme et plus il est profitable. C’est d’ailleurs un des facteurs qui a permis la baisse constante des tarifs, même si celle-ci est devenue excessive. Voilà une première certitude : l’excellence en matière environnementale sera la priorité des années à venir.  

Un problème : les affichages tarifaires

Les compagnies aériennes ont décidément beaucoup de mal à revenir sur leurs mauvaises habitudes qui consistent à privilégier les volumes de passagers à la rentabilité des entreprises. Mieux-même, elles ont lié les objectifs de prospérité au taux d’occupation des appareils. La hantise du siège vide, voilà ce qui conduit les stratégies commerciales des transporteurs. C’est ainsi que les campagnes publicitaires n’ont pour but que de mettre en avant des niveaux tarifaires dont le moins que l’on puisse dire est qu’ils ne couvrent pas les coûts. Alors qu’on aurait pu penser que l’arrêt forcé des exploitations ait conduit les dirigeants à revoir leur modèle de communication pour mettre en avant les aspects confort, sécurité, environnement, bref ce qui est dans l’air du temps, on ne voit pour le moment que des annonces tarifaires dites promotionnelles. Quand donc les transporteurs décideront-ils de communiquer sur ce qui fait les vraies valeurs du transport aérien et pas sur ce qui détruit sa perception dans le public ?

Une certitude : la croissance va revenir

Certes les flux aéronautiques vont changer. Dans les pays les plus développés les dessertes par voie terrestre vont gagner une part de marché conséquente sur l’aérien. C’est en particulier le cas en Europe où les distances sont courtes et les équipements au sol importants. Mais ce n’est certainement pas une situation générale dans le monde. Dans la plupart des pays, le transport aérien restera indispensable pour des raisons multiples : grandes distances, infrastructures au sol déficientes et contraintes de sécurité. Et puis il restera tous les vols long-courriers pour lesquels il n’existe aucune alternative à l’avion. On entend ici et là que le trafic « affaires » sera progressivement remplacé par des visio-conférences. Je n’en crois rien pour au moins deux raisons : d’abord s’il est possible de préparer un contrat ou de donner des directives à des équipes éloignées, rien ne remplacera le contact direct pour finaliser les transactions. Et puis n’oublions pas que les déplacements en classes affaires ou prémium rapportent beaucoup de miles et que ces FFP (Frequent Flyers Programs) sont très appréciés par les voyageurs professionnels, pour des raisons familiales. La marche en avant va reprendre dès que la totalité des frontières seront réouvertes,, et elle sera solide.

Une nouveauté : les eVTOLS

C’est un vieux rêve, celui du tapis volant d’Aladin. Il est en passe de devenir réalité. Les nouveaux taxis volants à propulsion électrique sont en cours d’expérimentation. Même les grands constructeurs s’y intéressent. Il ne fait aucun doute que leur fiabilité sera suffisante pour assurer la sécurité à laquelle le transport aérien est si attaché. Reste qu’il faudra intégrer ces nouveaux objets volants dans les espacés aériens urbains, et ce ne sera pas une mince affaire. Gageons néanmoins que l’on verra les premières dessertes régulières avant la fin de la décennie.

Le transport aérien n’est pas mort, loin s’en faut, même si cela déplait à certains tenants de la décroissance. Et c’est très bien pour la planète.