En 2024, la production de SAF devrait tripler, mais est-ce assez ?

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A travers un rapport, IATA assure que la production de SAF devrait tripler en 2024 et représenter 0,53% des besoins de l’ensemble du secteur de l’aviation. Un chiffre qui reste insuffisant par rapport aux objectifs fixés par l’UE.

Alors que le Parlement européen a donné son feu vert pour imposer aux compagnies et aéroports l’utilisation d’au moins 2% de SAF en 2025, ce taux monte à 70% d’ici 2050. Une directive inscrite dans un accord baptisé « ReFuelEU Aviation », saluée par certains acteurs du marché du voyage mais qui fait grincer des dents les compagnies. Pour rappel, l’accord fixe une part minimale de 1,2 % de carburants de synthèse dans le kérosène fourni par les aéroports européens en 2030-2031, puis 5 % en 2035, avant d’atteindre 35 % en 2050. Enfin, le texte prévoit que l’essentiel de l’approvisionnement en kérosène pour les vols au départ de l’UE se fasse dans les aéroports européens, afin de limiter les émissions dues à une cargaison excessive de carburant et d’éviter que les compagnies contournent les règles en s’alimentant en dehors de l’UE.

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Il serait donc logique que l’on parle enfin d’accélération du côté de la filière de production. Selon IATA la production de SAF devrait tripler en 2024, pour atteindre 1,875 milliard de litres, représentant 0,53 % des besoins en carburant de l’aviation et 6 % de la capacité de carburant renouvelable. Mais même avec cette croissance, la part de SAF dans la production totale de carburants renouvelables ne passera que de 3 % cette année à 6 % en 2024. IATA alerte donc sur le fait que l’offre de SAF restera limitée et que cela maintiendra les prix à un niveau élevé. « L’aviation a besoin de 25 à 30 % de capacité de production de carburant renouvelable pour SAF. À ces niveaux, l’aviation sera sur la trajectoire nécessaire pour atteindre zéro émission nette de carbone d’ici 2050 », indique l’organisation à travers son rapport. Selon elle, c’est aux gouvernements de donner la priorité aux politiques visant à encourager la production de SAF et à diversifier les matières premières avec celles disponibles localement. Mais les objectifs fixés par le « ReFuelEU Aviation » sont-ils atteignables ?

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1 300 milliards de dollars d’investissements nécessaires pour couvrir les besoins en SAF 

Selon Olivier Benoit, Senior Vice President chez Advito, ces chiffres ne sont pas incohérents entre eux et IATA semble se tenir à son plan net zéro carbone à horizon 2050. Cependant, là où le discours change est sur la capacité d’investissements nécessaire. « Si on part du principe que la production de SAF triplera en 2024, cela voudra dire qu’il y a eu des efforts colossaux mais que la quantité, elle, reste marginale car nous partons de très loin », explique-t-il. Il ajoute : « IATA demande un cadre législatif visible, stable et transparent. Des incentives seront nécessaires pour accélérer l’investissement dans la filière ». 

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A la question : les objectifs de 2050 publiés par « ReFuelEU Aviation » sont-ils atteignables ? La réponse est plus nuancée. Si l’industrie fait preuve d’un optimisme sans faille, dès lors que l’on regarde les chiffres en détail, le doute s’installe. « Sur le terrain, la réglementation a été votée, les investisseurs se lancent, les compagnies font preuve de bonne volonté mais est-ce que cela sera suffisant ? », déclare Olivier Benoit. Dans un podcast publié par Aviation Week, Haldane Dodd, executive director of the cross-industry Air Transport Action Group, estime qu’il faudrait 1 300 milliards de dollars d’investissements si l’on souhaitait atteindre le net zéro carbone d’ici 2050, soit injecter 1 milliard de dollars dans la filière par semaine à compter d’aujourd’hui. Est-ce que cela est en train de se produire ? La réponse est non. Olivier Benoit nous rappelle que les besoins annuels en carburant pour le transport aérien s’élève aujourd’hui à 360 milliards de litres. Si l’on prend en compte les prévisions de IATA sur une augmentation du trafic dans les prochaines années, donc des besoins en carburant, l’échéancier fixé par l’UE semble compliqué à tenir…