[Exlu] Travel Planet saute dans le train OUIGO, les EDV négocient…

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[Exlu] Travel Planet saute dans le train OUIGO, les EDV négocient...

Tandis que les négociations entre les Entreprises du Voyage (EDV) et la SNCF achoppent sur les commissions OUIGO aux agences et donc à l'accès, via GDS, de l'offre, Travel Planet a pris le train grande vitesse : l'offre OUIGO est désormais proposée à ses clients.

OUIGO, faut-il le rappeler, c'est cette offre lowcost proposée par la filiale SNCF du même nom, à partir de 2013. A cette époque-là, et durant plusieurs années, les prix sont tirés vers le bas, notamment, par des horaires dissuasifs et des gares excentrées (non pas Lille mais Tourcoing, non pas Paris mais Marne-la-Vallée...).

Négo EDV-SNCF

Mais les choses ont évolué. OUIGO s'est fait plus fréquent, a élargi sa gamme de services, et, angle saillant du virage, vers 2018-2019, s'est mis à desservir des gares de centre-ville. L'exposition se fait plus forte au point de se substituer à certains TGV inOui. Dès lors, les agences de voyage business, réclament l'accès à l'offre OUIGO susceptible, désormais, de satisfaire leurs clients.

A tel point que les Entreprises du Voyage (EDV) se sont emparées du sujet : au programme des négociations entre le syndicat et la SNCF, outre la commission aux agences sur le ferroviaire, figure en bonne place le fameux sésame de l'offre OUIGO devenue désirable. Pour l'heure, le seul moyen, pour une agence, est d'en passer par le canal BtoC, autant dire un biais limitant puisqu'il implique du offline.

Du côté de OUIGO, le moment de la maturité, où la distribution indirecte dévoile ses charmes (d'autant plus affriolants que les OUIGO sont depuis peu distribués avec l'offre SNCF globale, de façon moins visible, donc), est arrivé. Les intérêts bien comptés des deux parties sont donc réunis.

> Lire à ce sujet : Interview Olivier Pinna (SNCF)

Et c'est donc une automatisation du process, via un GDS, qu'on pourrait croire au cœur des discussions "EDV-SNCF". Mais pas tant que ça. D'après Valérie Sasset, présidente de la Commission Transport des EDV (et DG et VP Europe de BCD Travel), "le développement de l'offre OUIGO par un GDS ne pose pas de problèmes techniques. C'est le montant de la commission qui bloque". Celle proposée par la SNCF est de l'ordre de 0,7%... Quelque deux points inférieur à celui des autres trains... pour un même travail fourni par la TMC. 

Le choix de Travel Planet

Les problèmes techniques liés au GDS sont d'autant moins cruciaux qu'on peut s'en passer. C'est le choix qu'a fait Travel Planet, il est aujourd'hui opérationnel. Pour se plugger en direct à l'offre de la lowcost, la TMC a dû se conformer aux conditions de OUIGO : posséder une PAO; avoir la capacité technologique de mettre en place une plateforme reprenant l'ensemble de ses tarifs et services (OUIGO, OUIGO ESSENTIEL, OUIGO PLUS): idem pour son système transactionnel très particulier. Les conditions générales vont jusqu'à affecter la politique commerciale de la TMC : la distribution OUIGO c'est à tout le monde ou à personne, pas moyen de discriminer (et donc de monétiser) entre les clients.

Les exigences sont lourdes, Travel Planet les a pourtant respectées et se proclame aujourd'hui "première marketplace française de voyage professionnel" à être OUIGO-compatible. Les EDV, quant à elles, prétendent que quelques autres agences ont elles aussi franchi le pas, sans qu'on puisse le vérifier, il s'agit vraisemblablement d'OBT BtoC. Peu importe : une TMC importante a fait ce choix et c'est une indication intéressante sur l'état du marché du business travel.

Produit d'appel

Cette indéniable longueur d'avance prise par Travel Planet sur ses concurrents s'explique certes par sa maturité technologique qui lui permet de contourner le GDS : "le développement n'a duré que 5 semaines grâce à notre solution Click & Control qui, depuis 2017, a accumulé des fondations assez solides pour intégrer rapidement. D'autres acteurs tech pourraient le faire. Mais vous voyez KDS s'y intéresser ?", explique Tristan Dessain-Gelinet, cofondateur de la TMC.

Mais aussi par une toute autre lecture de la situation : "On estime, explique le même, que les commissions OUIGO seront de l'ordre de 0,5 à 1%, sur des tarifs très bas, qui plus est. Seraient-ils de 2 ou 3% que ça ne changerait pas grand chose. Pour nous, l'offre OUIGO, ce n'est pas une source de revenus, c'est un produit d'appel. Car tous nos clients nous la demandent".

Et c'est là que la stratégie de la TMC révèle l'actuel tropisme ferroviaire du voyage d'affaires. Certes, d'après Jean-Pierre Farandou (PDG de la SNCF), l'offre OUIGO sera présente sur un quart des destinations françaises d'ici 2025. Mais, à la limite, ce n'est pas vraiment le sujet : "On ne sait si les entreprises qui demandent du OUIGO auront effectivement des collaborateurs qui l'utiliseront mais elles le demandent et on se doit de leur répondre, c'est notre job que de leur proposer l'offre la plus large possible". Et la TMC de s'appuyer en outre sur une propositions de 50 compagnies ferroviaires, dont le Trenitalia Paris-Lyon-Turin. 

Au final, ce ne sont pas les clopinettes que générera la lowcost ferroviaire, mais l'agrégation opportuniste de son offre, révélatrice de l'agilité de sa TMC, qui font dire à Betty Seroussi, présidente de Travel Planet : ça "nous permettra de nous hisser dans le Top 5 (des TMC françaises) à l'horizon 2025". Pas vraiment un train de sénateur.