Voyage d’affaires : quand de nouveaux acteurs viennent bousculer le marché

1011

Les géants du web lorgnent de plus en plus le secteur du voyage. Et de jeunes pousses témoignent de grandes ambitions dans le voyage d’affaires. Les acteurs traditionnels n’entendent toutefois pas se laisser tondre la laine sur le dos sans réagir, les TMC s’inscrivant elles aussi dans une logique de «one stop travel platform».

Les géants de l’internet commencent à sérieusement pointer le bout de leur nez dans le secteur des voyages. Google a mis fin à l’application GoogleTrips l’été dernier, mais avec certaines fonctionnalités basculant sur Google Travel, aujourd’hui un outil moteur pour l’entreprise de Moutain View, de plus en plus ergonomique et attractif, avec depuis peu un onglet Hôtels et à terme une intégration de la solution de paiement en ligne Google Pay.

François-Xavier Izenic, dans le cadre d’une intervention lors des dernières Journées des Dirigeants Manor à Monaco, a cité d’autres géants du web qui lorgnent sur le secteur du tourisme. Amazon est en cours de recrutement d’une équipe sur le travel, et teste actuellement son offre en Inde. Airbnb a recruté un ancien de la compagnie Virgin America, Fred Reid, pour s’occuper d’une division Transport. Et Booking teste aussi la vente de vol sec, y compris en France. Pour certains spécialistes du secteur, nul doute que les GAFA s’attaqueront bientôt au voyage d’affaires.

De nouveaux acteurs se disputent déjà le marché du business travel. Ces spécialistes du voyage d’affaires surfent sur une insatisfaction : 73% des acheteurs et travel managers trouvent les outils loisirs plus performants que les outils corporate (enquête Festive Road «Oh BT! Why OBTs Need to Wake Up and Smell the Coffee»).

Ils se nomment TripActions, TravelPerk, NexTravel, TravelBank et Rocketrip, voire les français Fairjungle et Supertripper. Leurs moyens sont importants, à défaut d’être aussi considérables que ceux des GAFA. TripActions par exemple, basée à Palo Alto (Californie), a levé 480 millions de dollars. Sorte d’hybridation entre une TMC et un SBT, cette entreprise créée en 2015 est aujourd’hui valorisée 4 milliards de dollars.

Pour François-Xavier Izenic, ces nouveaux acteurs déclarent tous mettre le client au centre du jeu, et abandonner l’ancien modèle basé sur la relation producteur-distributeur. La «one stop travel platform» devient le lieu rendant possible l’interaction et la rencontre entre une multitude de partenaires. Un espace d’hybridation entre technologie et business, avec des fournisseurs y trouvant leurs comptes, et notamment les compagnies aériennes desserrant l’étau vis-à-vis des OTA. Pour Ariel Cohen, co-fondateur de TripActions, les grandes TMC telles qu’Amex et CWT sont mortes car construites autour des GDS. Ces nouveaux acteurs font valoir au contraire une infrastructure IT cohérente, leur capacité à aller chercher les meilleurs tarifs aériens dans le monde entier, des temps de réservation drastiquement réduits, des voyageurs récompensés quand ils économisent sur les dépenses…

Les grandes TMC ont-elles pour autant des raisons de s’inquiéter ? Elles ont atteint une taille critique, avec d’importantes parts de marchés. Et elles aussi s’inscrivent désormais dans une logique de plateforme. CWT se présente ainsi aujourd’hui comme une plateforme de voyages dite «business-to-business-for-employee» (B2B4E). BCD Travel vient de lancer son SolutionSource Developper Hub. Autre exemple de leur capacité d’adaptation : les grandes TMC telles Amex GBT et CWT engagent de gros développements pour faciliter les réservations NDC via les GDS.

Pour Sarosh Waghmar, fondateur et CEO de la jeune pousse du voyage d’affaires WTMC (interview publié dans le MOOK Business Travel édition 2018 de TOM.travel), ces TMC «se disent ‘globales’ alors qu’en réalité elles fonctionnent comme des réseaux composés de partenaires régionaux de plus petite taille et d’indépendants qui servent les clients sur ces marchés locaux». Peut-être certains argueront-ils que local peut aussi rimer avec global…