Hep, Freenow ! L’appli intègre les taxis à son offre (ou « La paix des braves »)

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Hep, Freenow ! L'appli intègre les taxis à son offre (ou
A notre connaissance, le taxidriver R. de Niro ne sera pas intégré à l'appli Freenow.

Freenow intègre une offre de taxis à son app. Une manière de conclusion (temporaire ?) au conflit opposant cette corporation aux "desperados" VTC ?

Après les scooters, trottinettes, vélos, les services d'autopartage, la location de voiture, et, bien sûr, les VTC, ce sont désormais des taxis qu'on peut commander sur l'app Freenow, qui s'autoproclame, en vertu de cette diversité d'offres, "superapp" - cela implique-il qu'elle se revête d'un justaucorps bleu et d'un slip rouge ? Nous l'espérons.

Help !

Mais quand ces différentes solutions de mobilité, "micro" mais pas que, étaient le fruit de partenariats avec des entités structurées - TIER, Dott, VOI, Cooltra, Share Now, cette nouvelle proposition nécessite une démarche commerciale au scalpel. Il s'agit pratiquement d'aller démarcher quasi individuellement chacun des quelque 10.000 indépendants d'Île-de-France, puisque c'est sur cette zone géographique que l'offre est déployée depuis le 1er juin.

La phrase précédente contient un abus de langage. En réalité, et, surtout, par définition légale, tous les taximen sont indépendants. Mais certains le sont moins que d'autres. On pense notamment à ceux affiliés à Alpha Taxis (un millier de conducteurs en Île-de-France) et, surtout, à ceux du leader national : G7, environ 9.000 taxis sur la région parisienne.

Faites le compte : 9.000 G7 + 1.000 Alpha = 10.000. Reste l'autre moitié de la flotte francilienne comme potentiels partenaires pour Freenow. Ca y va mezzo voce quand même, ce qui est compréhensible, vu l'ampleur du porte-à-porte - pardon : du portière-à-portière - auquel doit se soumettre Freenow. D'après Dimitri Tsygalnitzky, DG France de l'appli, "ils étaient 400 la semaine dernière, 600 cette semaine, on espère un millier au début de l'été, et plusieurs milliers à la fin de l'année". Mais les indé, les vrais, ne sont que la cible prioritaire de Freenow, les autres sont quand même dans la mire. Enfin, on verra.

Hum !

Quoiqu'il en soit, c'est quand même un épisode ambigu qui se déroule sous nos yeux : la guerre VTC/taxis prend décidément une drôle de tournure. Il y eut d'abord la guerre totale. Entre des taximen qui se payent une licence au prix d'un pavillon de banlieue ou de province (selon la banlieue, selon la province, en gros 100.000 €) et des chauffeurs improvisés, dont le statut fut si disruptif qu'on en tira un nouveau substantif - "ubérisation" - pas franchement mélioratif, et franchement repoussoir en termes de droit du travail.

Guerre totale, c'est entendu. Et de position aussi, les plus meurtrières, dont les tranchées furent creusées dans les tribunaux, prudhommaux mais pas seulement. Jusqu'à une seconde phase, bien illustrée par l'interview que nous accorda, en février dernier, le DG délégué de G7. En gros, Yann Ricordel nous expliquait alors combien les VTC avaient réveillé la nécessité de modernisation de sa boutique, forte de pas mal de kilomètres au compteur, puisque les Taxis de la Marne de la Première guerre mondiale, c'étaient eux (si, si).

> Lire aussi : Y. Ricordel : "Nos tarifs réglementés sont un atout"

Hope

Et donc il y aurait cette troisième phase où les ennemis d'hier deviendraient les meilleurs potes d'aujourd'hui. D'aujourd'hui, pourquoi pas. Mais de demain ? Si, au bout d'un moment, ayant éclusé les indé pur sucre, Freenow s'approchait d'un peu trop près des chauffeurs G7 ?... Encore une fois : à voir.

En attendant, des taxis décident délibérément d'offrir leurs services sur l'appli Freenow. On abandonne un temps la métaphore géopolitique, pour la cosmologie : on n'est pas non plus, selon Dimitri Tsygalnitzky, dans une révolution copernicienne : "Le métier historique de Freenow, c'est le taxi. D'ailleurs, le nom d'origine de l'appli, c'est "Mytaxi". On est, à l'origine, le G7 européen". Du coup, considérant l'historique, Freenow serait donc le mandataire idéal pour signer cette paix des braves entre TMC et taxis.

A condition que les clauses ne soient pas versaillaises. L'avantage pour les taxis : une commission sur chacune de leurs courses "Freenow" de 15% (finalement à 12,5% par jeu fiscal en fin d'année) mais aucun abonnement. En tout cas pour l'instant : ces conditions sont une offre de lancement.

Hype

Et pour l'utilisateur ? Déjà, l'avantage évident de retrouver différents modes de transports sur la même appli : praticité et économie d'octets. Ce qui fait dire à Dimitri Tsygalnitzky que Freenow est "le Booking ou l'Expedia de la mobilité urbaine". Mais aussi y satisfaire des besoins qui diffèrent moins par la typologie des voyageurs que par les objectifs d'utilisation. Les taxis sont déjà disponibles sur Freenow dans différents pays européens. Le recul est suffisant pour que le même explicite : 

"Les taxis vont être privilégiés durant les heures de pointe pour que le véhicule puisse emprunter les couloirs de bus. Ou bien dans les trajets à destination des aéroports ou gares pour être conduit juste devant sa "porte", par forcément accessible aux VTC."

A contrario, les VTC seront vraisemblablement préférés pour les trajets longue distance, notamment en banlieue, destinations peu rentables pour les taxis parisiens, interdiction de la "maraude" (arrivé en bout de course à Puteaux, par exemple, un taxi parisien ne peut prendre un passager dans cette commune, il lui faut repasser le périph') oblige. 

Hot !

Concrètement, sur l'appli, quand on commande un transport motorisé d'un point A à un point B, l'utilisateur se voit proposer un affichage comparatif selon deux critères : le prix et le temps d'attente. Evidemment, en termes de tarifs, pour les taxis, c'est une fourchette qui est proposée, le montant de la course se faisant "au compteur". Encore l'IA mettra-t-elle en avant les offres correspondant aux préférences des deux dernières courses achetées.

Pour les clients business, l'utilisation des taxis via Freenow permet, on s'en doute, les mêmes systèmes de facturation, de transmission et de reporting (pour le voyageur comme pour le travel manager) que pour pour les autres modes de mobilité de l'appli, par la grâce des partenaires Cytric (Amadeus) et Concur. Le paiement pourra se faire en cash (ce qui, pour les touristes, peut faire pencher vers le taxi plutôt que le VTC : faut bien dépenser les devises changées), carte perso ou carte entreprise. A noter que, sans surprise, on peut, sur l'app, passer de son profil perso à son profil pro en toute fluidité.

Hips !

Le communiqué de presse informant de cette implémentation de taxis dans l'app Freenow en Île-de-France précise qu'elle "aboutit à une meilleure disponibilité et une plus grande flexibilité de service, participant ainsi à la fidélisation des utilisateurs et ce au bénéfice de tous les chauffeurs. À Berlin, par exemple (...) le rythme de croissance des demandes de courses a augmenté de 17 % et le taux de prise en charge a augmenté de 2 à 3 points."

Après une telle déclaration, on se doute que Marne-la-Vallée sera couverte par cette nouvelle offre "taxis" via Freenow. Car dans ces conditions, ce n'est plus la paix des braves, c'est Disneyland !