Que faut-il retenir du BTS 2018 ?

109

Au vu de la fréquentation, le BTS de Londres est sans conteste une réussite pour les organisateurs. Sans surprise, la curiosité l’a emporté sur les annonces de nouveautés, moins nombreuses que les innovations présentées comme à venir. C’est aujourd’hui toute la différence entre la réalité concrète et la vision des lendemains qui chantent.

Parmi les participants, un acheteur voyages anglais nous disait : "On vient surtout au BTS par curiosité mais également pour voir le réseau et mettre à jour les listes de contacts, car ça bouge pas mal. On prend également la température du marché qui se consolide". Par une phrase, tout est dit car les nouveautés ne sont pas légion dans cette édition du BTS, sauf pour les annonces de rachat et de globalisation d’un marché Anglais étiolé.

Côté transporteurs, pas de révolution, peu de participants et aucune annonce d’importance. Même les compagnies du Golfe ont déserté la place. Côté TMC, elles sont présentes mais les enseignes classiques continuent de présenter un modèle basé sur l’architecture SBT/GDS, faisant ainsi route opposée aux éditeurs présents en masse et qui affichent des écrans tous plus prometteurs les uns que les autres. Beaucoup de solutions B2C/B2B sont proposées. Toutefois, quand on creuse un peu, rien de réellement folichon ne retient l’attention car les interfaces permettant de relier et d’exploiter pleinement ces modules manquent cruellement à l’appel. Les solutions ne sont pas réellement exploitables dans le cadre d’un pilotage de marché par les achats.

Autre constat de mon collègue Anglais, le networking tourne à fond. Et même si les associations couvrant les activités du travel management ont déserté les lieux, les acheteurs sont là, montrant clairement la maturité avancée du marché britannique qui a 6 mois d’avance par rapport au nôtre. Ce constat est plus qu’intéressant car il y a ici un réel renversement du marché, confirmé par plusieurs acheteurs et fournisseurs Anglo-Saxons, Allemands et Nords Européens.

Jusqu’à il y a peu, toutes les données étaient accessibles à tous, permettant justement cette prolifération des éditeurs. Or la donne a changé et on constate que les robinets se ferment et ne s’ouvrent qu’avec parcimonie à conditions que les engagements entre partenaires soient clairement définis, bornés et mesurés. On parle ainsi de NDA (Non Disclosure Agreements) plus que d’accords commerciaux intégrant des valeurs numériques basées sur des paramètres eux même-estimés. On est donc dans le factuel plutôt que dans l’échange de bonnes intentions. On mesure, on pèse et on valorise et surtout, on décide.

Ce renversement donne naissance à une tendance qui est celle de la chasse aux acteurs globaux de toutes tailles qui savent piloter leurs accords et délester les acheteurs d’une multiplicité de négociations. Preuve de cette maturité avancée : les déplacements d’affaires s’achètent ici et dans une grande partie de l’Europe du Nord, comme une commodité (un accord avec un prestataire majeur) et non comme un marché (réseau de fournisseur agissant dans un domaine précis).
La pépite recherchée par les acheteurs et les fournisseurs n’est pas un intégrateur mais bien un générateur d’interfaces intelligentes, exploitables et utiles pour le client final. Bref, on recherche la valeur ajoutée qui fluidifiera la gestion de la commodité. C’est d’ailleurs amusant de voir les fournisseurs se courtiser entre-deux pour associer leurs forces. Personnellement j’ai vu de bonnes choses mais je ne juge pas les solutions présentées comme étant déjà à leur apogée.

Côté NDC, beaucoup d’acteurs ont promis une annulation des effets mais nombre de clients ou d’intermédiaires passifs déchantent car là aussi, il y a, au niveau des transporteurs, une tendance de fond à appliquer la règle stricte des surcharges financières en fonction du canal de réservation utilisé. Mieux, le futur Brexit donne au transporteur national du Royaume-Uni une indépendance par rapport aux précautions économiques et commerciales usitées au sein de l’Union Economique Européenne. Alors que feront les continentaux si les Britanniques font bande à part… La réponse est « cristal clear » : la même chose que leur voisin Anglo-Saxon !

En résumé, cette édition du BTS a montré qu’un mouvement de fond est engagé outre-Manche, que les pays de l’Europe du nord et l’Allemagne ont marché sur les pas de Anglais mais que les Français restent en retard par rapport à cette évolution. Mais pour combien de temps encore ? A en croire la tendance et l’avance des Britanniques, environ 6 mois.

Yann Le Goff