L’agence de voyages et le monde d’après (3/4) : « Le confinement a été complétement chaotique »

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Face à la crise, le réseau d’agences Selectour a su se réorganiser afin de répondre aux besoins de ses clients. Si le choix de garder un ADN avant tout « offline » s’est révélé être un atout durant cette crise, elle a néanmoins remis en question certains modes de fonctionnement au sein des agences de voyages spécialisées dans le Business Travel, dont leur modèle économique. Patricia Morosini, directrice voyages d’Affaires chez Selectour, revient sur la gestion de la crise du COVID-19 et son impact sur un secteur qui était déjà en pleine mutation.

DeplacementsPros.com : Quelle est la situation actuelle chez Selectour ? Observez-vous une légère reprise ?

Patricia Morosini, Directrice voyage d'affaires chez Selectour Radius Travel
Patricia Morosini, Directrice voyage d’affaires chez Selectour

Patricia Morosini : Pour le moment nous ne pouvons pas parler de reprise car nous n’en avons pas. Nous parlons de rebond d’activité pour les mois de juillet et août aux environs de 40% environ par rapport à l’année précédente mais pas de reprise. Pour le mois de septembre nous espérions atteindre les 50% de retour à l’activité mais cela reste très variable en fonction des clients et des agences. Le trafic reste principalement domestique et les vols long-courriers sont minoritaires. De ce côté-là, chez Selectour nous nous considérons comme chanceux car nos clients sont principalement des PME/PMI et que leur retour aux déplacements est plus rapides car moins processés, contrairement au grands groupes.

Comment avez-vous géré cette crise, de son début jusqu’à présent ?

Nous avons continué d’assurer un service opérationnel et nous avons fait appel à des experts car, notamment au début, il y avait beaucoup de confusion concernant les compagnies aériennes et les démarches à suivre pays par pays. Nous avons ensuite procédé aux annulations et aux échanges de tous les voyages en cours et pour cela, les compagnies aériennes ne nous ont pas facilité la tâche, même si cela commence tout juste à se débloquer. Commercialement cela n’a pas été neutre et le confinement a été complétement chaotique. Aujourd’hui il y a de nombreux paramètres qui effraient les voyageurs et les entreprises dans la reprise des déplacements : fermetures des frontières, quarantaines, hôtels qui décident de fermer du jour au lendemain … L’un des seuls points positifs est que nos partenaires ont revu leurs conditions de réservation ou d’annulation qui sont désormais beaucoup plus souples.  Il y a davantage de flexibilité et cela pourrait favoriser la reprise. En revanche, pour l’aspect « sécurité », il y a encore une vraie crainte de la part des sociétés et des voyageurs.

Être une agence « physique » vous a-t-il été bénéfique en cette période de crise ?

Nous avions effectivement des équipes opérationnelles dans nos agences et dans certains pays ce qui a été une chance. Nous avons des experts qui répondent aux questions des voyageurs, même les plus spécifiques. Aujourd’hui nous finalisons davantage d’offre en offline qu’en online car les personnes ont besoin d’être rassurées et d’avoir un suivi ultra personnalisé. Nos équipes offline ont un rôle très important dans ce devoir d’information et d’accompagnement. Je pense que cela a mis en lumière l’importance des agences de voyages et leur rôle en tant que professionnels auprès des entreprises.

Comment voyez-vous l’année 2021 ?

Aujourd’hui notre mission est d’accompagner les entreprises et les aider à revoir leur politique voyages afin de se déplacer autrement et apprendre à composer avec des réglementations qui évoluent sans cesse. Cette crise va permettre une refonte profonde des politiques de voyages au sein des entreprises. Il y a une réelle nécessité à s’adapter aux nouveaux besoins. En parallèle, il nous faut rassurer les entreprises et pour cela nous attendons au plus vite une harmonisation des restrictions de voyage, du moins à minima en Europe. Nous sommes de toute façon dans l’attente et dépendants des autorités. Aujourd’hui les deux problématiques principales sont : les tests PCR et les quarantaines.

Y aura-t-il pour vous un avant et un après COVID-19 ?

Les entreprises vont effectivement probablement prendre conscience de l’importance de l’agence et de son assistance. Elles vont également davantage s’intéresser à l’aspect RSE. Cette crise a provoqué une réelle prise de conscience sur notre façon de voyager et de nous déplacer. Nous allons observer également un durcissement des règles concernant le leakage qui sera totalement banni. Tout déplacement hors politique voyages ne sera pas validé. Pour nous les agences de voyages, la réflexion se fait actuellement sur notre modèle économique. Avec cette crise nous avons pu voir que cela ne fonctionnait pas en période de crise … le marché s’apprête assurément à évoluer.

Le dossier dans son intégralité :