QFD, comment optimiser ses relations fournisseurs (partie 2)

453

La semaine dernière, Yann le Goff nous a expliqué comment bâtir un appel d’offres adapté aux évolutions des besoins et du marché. Il nous avait alors proposé une technique dérivée de l’approche modulaire permettant de cartographier les besoins présents et futurs et ce, quel que soit le budget de votre organisation. Voici la suite de cette série d'articles sur les achats qui connaissent un très grand succès chez nos lecteurs.

QFD ? La semaine dernière, je vous ai présenté cet outil de Développement des Fonctions Qualité permettant de définir une matrice des besoins, afin de vous permettre d’éditer un appel d’offres le plus précis possible. Cette méthodologie - utilisée dans la conception de nombreuses machines dont nos moyens de transport favoris (voiture, trains, avions…) - apporte à l’industrie les avantages suivants :
• Moins de changement (ils arrivent plus tôt dans le process)
• Temps de développement raccourcis
• Moins de problèmes à l’implémentation
• Frais de démarrage réduits
• Coûts de garantie réduits
• Transfert des connaissances
• Satisfaction clients (ou voyageurs)

Sur le plan des achats, la parfaite définition des besoins en amont des programmes de resourcing permet généralement une économie d’environ 30% et une réduction des temps d’appel d’offres de 30 à 50% ! L’industrie l’a bien compris et utilise cette méthodologie sans retenue car elle permet de créer l’innovation et de maximiser les marges sur les produits ainsi créés.

Et bien sachez que cette méthodologie s’applique également aux achats dits hors production. Dans le cadre d’un appel d’offres sur l’agence et ses services, elle va vous permettre de travailler en coût complet car elle donne le moyen à l’agence de « jouer » dans un périmètre ultra-précis que vous lui aurez défini grâce au QFD.

Vous pourrez donc, ensemble, travailler sur les coûts et même sur les marges mais je vous développerai cette approche dans les prochains articles. Maintenant passons à l’étape 2 qui consiste à partager votre QFD et surtout à faire évoluer ce dernier grâce à l’apport d’expertise des fournisseurs.
Une fois que vous avez établi et partagé en interne votre QFD, proposez-le et surtout, expliquez-le aux fournisseurs pressentis auxquels vous demanderez de compléter les axes verticaux et horizontaux ainsi que les notations quoi /comment. La pondération peut également être partagée, même si c’est plus à vous de la définir en fonction de vos attentes

En clair, un fournisseur peut vous dire qu’il manque des impératifs techniques, il peut vous informer d’un changement de tendance client et il peut changer la notation quoi/comment. Ce sont ces commentaires qui vont faire évoluer votre matrice et ainsi générer le profil idéal de votre appel d’offre.
Mieux, son expertise peut vous montrer que vous n’avez pas anticipé certaines évolutions, que vous en surestimez d’autres ou bien que votre analyse de contribution (le cœur de la grille du QFD) est erronée.

Prenons par exemple le cas du NDC ou du RGPD. Tous les fournisseurs n’auront pas le même feedback mais ils ajouteront des lignes et des colonnes auxquelles vous n’auriez pas forcément pensé. En termes de marketing achat, Il faut donc viser large et ne pas hésiter à sortir des sentiers battus. De toute façon, cette méthode disruptive de questionnement est généralement plébiscitée par les organisations apprenantes et rejetée par les organisations traditionnelles car pas assez conforme aux réponses toutes faites qu’ils ont l’habitude de manipuler.

Comment choisir les fournisseurs ?
C’est simple : regardez ceux qui communiquent, exposent et ceux qui sont disruptifs car ils auront forcément une valeur ajoutée dans l’exercice et apporteront l’innovation. Les « muets » peuvent être contactés mais il est fort à parier qu’ils n’auront pas de valeur ajoutée à l’exercice (ce qui ne vous interdit pas de les consulter une fois l’appel d’offres défini).

Cet exercice d’échange peut se faire en groupe (présentation globale de la méthodologie) puis en séparé le même jour pour prendre le feedback (à ce moment là, divisez votre équipe et « tournez » entre les différents fournisseurs).

Maintenant, charge à vous d’analyser tous les retours et de définir, avec votre équipe, les éléments que vous retiendrez. Cette méthode de travail s’appelle l’ESI (Early Supplier Involvment) et ne peut se faire que si vous avez le champ totalement libre et surtout le support inconditionnel de votre Direction.

Pour information, vous trouverez une présentation sommaire en annexe (en anglais). Elle ne demande pas d’être un expert du marché et c’est peut-être là l’apport majeur de cette méthode. Elle demande de savoir faire parler les demandeurs, de savoir faire de la veille technico-commerciale et de savoir mener une équipe pluridisciplinaire. Les fournisseurs feront, quant à eux, la finalisation technico-commerciale de votre projet en fonction de leurs capacités mais surtout en fonction des tendances du marché.

Dans le marché de l’informatique, cela s’apparente aux fameuses Business Blue Print sauf que là, vous n’êtes pas contraint de travailler avec un seul fournisseur (Notez au passage que cette méthode peut servir à générer un pré-appel d’offres qui permettra de sélectionner le fournisseur qui fera une Business Blue Print sur un scope dédié. J’ai personnellement utilisé cette technique qui avait donné d’excellents résultats et une satisfaction client/fournisseur/utilisateurs finaux). Là également, il est préférable de se faire aider par une source extérieure maîtrisant cette technique, surtout si votre budget voyage dépasse les 3M€.

La semaine prochaine, nous continuerons de travailler sur cette approche modulaire des achats de voyage. Je vous expliquerai comment compiler les informations du QFD revu par les fournisseurs et définir le périmètre et les éléments de votre prochaine consultation.

Yann LE GOFF
Consultant achats
[email protected]