SNCF : pour Élisabeth Borne, la grève est uniquement « politique »

92

Ce n'est pas la première fois qu'un membre du gouvernement évoque le caractère très politique de la grève SNCF. Il y a quelques semaines, le premier ministre avait d'ailleurs évoqué la volonté de certains "d'obtenir par la rue ce qui n'avait pas été acquis par les urnes". Élisabeth Borne, la ministre des transports, enfonce le clou : "Le but du mouvement n'est pas la défense du service public mais la contestation du gouvernement".

Alors que 63 % des Français contestent l'intérêt du mouvement mené à la SNCF, principalement par la CGT et Sud Rail, la ministre des transports s'attaque au fond même du problème qu'elle juge "plus politique que social". Alors que la réforme ferroviaire a été définitivement adoptée cette semaine au parlement, la CGT et Sud Rail annoncent la poursuite du mouvement pendant le mois de juillet, période traditionnellement sans grand mouvement social pour ne pas pénaliser les vacances des Français. Une décision que la CGT a beaucoup de mal à justifier. Pour elle, il s'agit de contester dès aujourd'hui la prochaine grande réforme des retraites qui s'attaquera aux régimes spéciaux des cheminots, considérés aujourd'hui comme l'un des plus avantageux et surtout des plus coûteux.

Mais cette position, qui commence à ne plus être partagée par les salariés du transporteur ferroviaire qui s'expriment sur les réseaux sociaux, a des limites au sein même de l'intersyndicale. À la CFDT, comme à FO, on sait que tout jusqu'au-boutisme se retourne généralement contre celui qui mène le combat. Et face à une grève inutile, le gouvernement aurait tout intérêt à s'engager sur un projet de réforme des retraites plus dur qu'il ne l'imaginait à l'origine. Il sera difficile pour les syndicats d'expliquer à leurs adhérents que le mouvement se maintient au cas où et que les pertes financières qu'il engendre chez les salariés sont le prix à payer d'une prochaine réforme dont personne ne connaît pas très précisément les contenus. Là encore, selon l'un des ministres du gouvernement "le mélanchonisme ferroviaire joue en faveur des réformes à venir".

L'autre surprise née de la grève, c'est la capacité des voyageurs à s'adapter aux nouvelles technologies. Utilisation du car pour les trajets de moyenne distance, covoiturage, vidéoconférence, travail à domicile… beaucoup se sont rendu compte qu'il était possible de limiter les effets de la grève en adaptant les outils technologiques aux besoins de leur activité professionnelle. Certes, la grève s'est durement fait sentir au début sur les transports franciliens assurés par la SNCF. Mais après, les effets étaient moins pesants. Une occasion en or pour le gouvernement de ressortit le fameux projet de loi visant à la création d'une société unique, qui regrouperait RATP et SNCF en Île-de-France. Valérie Pécresse se dit attentive à une évolution de ce type dans un grand Paris aux moyens de déplacements multipliés par deux d'ici à 2050.

Enfin, pour les observateurs politiques, spécialisés dans les conflits sociaux, la sortie de grève de la CGT se fera sans doute discrètement dans les prochaines semaines. Il faudra simplement faire croire aux adhérents que le combat mené a été utile. Ce dont semble douter aujourd'hui plus de 48 % des salariés de la SNCF.