L’importance des achats (3/5) – Warning! Marketing!

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Prendre une décision n’est jamais facile, mais prendre la bonne est l’exercice le plus difficile des achats. Et si le trouble-fête s’appelait le marketing ?

Parfois trop vendeur ou surréaliste, parfois sincère ou pitoyable, le marketing est l’outil des communicants qui formatent les informations pour donner envie aux acheteurs de croire au message diffusé. Mais attention, ne méprenez pas ce que je dis, car le marketing est essentiel à la bonne vie du commerce. Toutefois, il devient toxique lorsqu’il franchit la barre du lobbying ou du pathétique. Et c’est là que l’acheteur, en bonne intelligence, doit exercer la plus grande des prudences.

Le moment le plus délicat arrive lors des ruptures technologiques ou commerciales, car elles engendrent un changement radical d’état dont le fournisseur doit savoir profiter. Kodak, pourtant leader incontesté de la photographie argentique, n’a pas su négocier le virage du numérique. Il a pourtant usé de toutes les ficelles du marketing et du lobbying pour contrer cette technologie, mais rien n’y a fait. Les téléphones portables, les tablettes, les voitures électriques… Les low cost… ! Vous le voyez, les exemples sont nombreux et touchent même notre marché.

L’innovation comme seule planche de salut ?

L’innovation peut être le facteur déclenchant de ce virage, mais les changements de norme ou de loi le sont aussi. C’est la raison pour laquelle la veille technico-commerciale active doit être pratiquée sans limites par les acheteurs. Les Directions responsables le comprennent très bien.

Prenons l’exemple des normes. En automatisme industriel, une norme de communication a été définie afin de faire « parler » les équipements industriels entre eux, d’agréger les données, de les transmettre et de les interpréter. Tout cela se fait dans le cadre du développement de l’industrie dite 4.0. Ceux qui ne jouent pas le jeu de cette norme sont immédiatement mis hors-service par les clients et par la concurrence. Inutile de se battre ou de créer son propre format d’échange, s’il est en dehors de la norme internationale, la sentence du marché est immédiate. Les exemples passés sont nombreux. Souvenez-vous de ces techniques : SECAM, BETAMAX, LSE (le langage Basic en Français dans les années 80), 825 lignes, Minitel… des solutions bien françaises, parfois excellentes, mais qui allaient à contrecourant et qui ont disparu en un clin d’oeil.

Les normes changent et la seule solution pour anticiper ce changement, c’est d’être proactif tant côté fournisseur que côté acheteur. Malgré le marketing, l’acheteur ne doit pas se faire piéger. Il doit comprendre la raison qui initie un changement et être très au fait des tenants et des aboutissants. Seul, il lui sera difficile de faire toute l’analyse. Les Anglo-saxons le savent. Les Nordiques également. C’est la raison pour laquelle les associations professionnelles sont si actives dans ces territoires.

Une partie de poker menteur ?

Dans le marché des déplacements d’affaires, nous parlons de plus en plus de normes (RGPD, NDC). Aujourd’hui, certains prestataires communiquent sur le fait qu’ils sont prêts, d’autres le prouvent quand d’autres mentent et pire, des fournisseurs dépassés par les évolutions tentent de contourner le changement par une manœuvre de la dernière chance destinée à transformer un aveu d’échec en pseudo innovation qui sent plus la débâcle et la fin annoncée que la contre-révolution.

Tous les fournisseurs, les transporteurs, les éditeurs, les prestataires sont concernés par ce constat. Même Air France qui a annoncé avec force l’implémentation du NDC en avril 2018 et qui au final est la moins prête des 3 grandes et ce à cause de décisions politiques de l’ancienne direction qui n’avait pas pris la mesure de l’impact de ce protocole de communication dont bénéficient maintenant ses concurrentes British Airways et Lufthansa.

Alors de grâce amis acheteurs, ne croyez pas tous les messages transmis, mais analysez-les et jugez sur pièces. N’ayez pas peur d’échanger avec vos collègues. Vous verrez avant qu’il ne soit trop tard que les fournisseurs leader sont peut-être des colosses aux pieds d’argile et que les outsiders sont peut-être les futures « licornes ».